Sentiments cachés

 ( Histoire fictive )

 2 Septembre 1914.

Bonjour mon frère, J’espère que tu vas bien et que tu reviendras trèsvite... Je trouve que père et mère vont moins bien depuis ton départ, ils ne savent pas trop comment s'y prendre avec moi pour ne pas que je ressente leur tristesse ... Mais j'essaie de sortir avec mes amies. Je m'en souviens encore quand on avait 6 ans, que l'on courait dans le jardin en espérant attraper les oiseaux ou le chat de la voisine qui, parfois, venait chez nous. Maintenant nous avons grandi et n'avons plus les mêmes préoccupations ... Toi, parti au front et moi, dansant dans les bals.La vie est plus dure aussi, je trouve que Père arrive moins à travailler sans ton aide précieuse et mère, ​quant à elle, va au marcher acheter les légumes mais n'arrive pas à les choisir car c’était toi qui prenait toujours les meilleurs... Je ne pourrai malheureusement pas t’écrire tout le temps car je passe mon temps à l'E.P.S en IVéme année, pour pouvoir devenir institutrice. Père et mère sont exigeants pour l’école car ils veulent que je réussisse et non que je finisse dans une ferme comme plus de la moitié des filles de 16 ans. J'essaie de m'accrocher dans mes études mais cela est très compliqué, je m'aide souvent de mon amie, Rose, qui, elle est très douée. Elle m'accompagne très souvent au bal ce qui m'aide un peu à oublier ton absence... J’espère que pour toi la vie n'est pas trop dure au front et que tu as de quoi te nourrir...  Je t'enverrai une lettre dès que possible.

A bientôt.

 Adrienne

3 Septembre 1914.

Mon cher Fernand,

J’espère que tout se passe bien chez vous, de mon côté, tout va très bien. Nous n'avons pas eu la chance de parler davantage à notre rencontre au bal, je le regrette. Je ne sais pas ce que tu fais de ton temps chez toi, dis-m'en plus, car je ne connais pas grand chose de toi et j'aimerai bien en apprendre davantage. Es tu au front ? La vie est-elle aussi difficile qu'on le dit ici ? Ce sont de simples détails, mais je me raccroche à ce que tu veux bien me dire de toi... Mon frère lui est parti au front c'est pour cela que je te pose la question, cela fait bientôt 1 mois qu'il n'est plus là. Je lui ai envoyé une lettre car il nous manque beaucoup, à moi et à ma famille, comme tu peux manquer aux tiens, j'imagine. J’espère que cela ne va pas trop durer pour toi et mon frère, car c'est très dur de savoir que des personnes que l'on vient de connaitre et une personne chère nous ont quitté pour partir se battre. Pendant ce temps, pour oublier la guerre, je sors avec des amies, généralement au bal quand c'est possible. Je m'attèle aussi à mes devoirs à la maison seule ou bien accompagnée de Rose, ma partenaire à l'école.

Je t’écrirai au plus vite. 

Bien à toi.

Adrienne


15 Octobre 1914.
 Mon frère bien aimé, 
Désolée je n'ai pas eu le temps de t’écrire car mes études sont de plus en plus dures, donc j'aurais de moins en moins de temps à moi, ce qui me désole beaucoup parce que j'aimerais te raconter mes journées comme sii tu étais à côté de moi à chaque moment... Et puis mère et père m'en demandent davantage. Je crois qu'ils imaginent qu'en me plongeant dans mes cours, je pourrais oublier ton absence...ou du moins atténuer la souffrance que je ressens jour après jour. Cela fait un mois maintenant que tu es parti et la vie n'est vraiment plus comme avant... J’espère qu'au front il y a quelqu'un pour pouvoir t'apporter le manque d'affection que tu dois ressentir, je suppose.
 En parlant d'affection, j'ai rencontré une personne à un bal, qui me plaît beaucoup et je pense que des sentiments vis à vis de ce garçon, naissent. Je n'en parlerai pas à père et mère pour le moment, il est trop tôt, mais toi tu es mon frère donc je peux t'en parler en toute confiance. Je ne saurais  te dire comment il s'appelle pour le moment, car  il est malheureusement parti au front avant que je ne puisse lui demander. ​
Je lui ai parlé de toi et de ma vie, ce que je ressens, dans les situations dans lesquelles je me retrouve parfois. 
C'est quelqu'un qui m'est cher et je pense que dès que tu seras rentré de la guerre je te le présenterai.  
​Je t'embrasse très fort.
Adrienne
20 décembre 1914
Ma sœur,
Je vais très bien ne te soucis pas de moi, j’espère d'ailleurs que tu prends bien soin de toi.
La guerre, est dure et facile à la fois, nous avons perdu beaucoup d'hommes, des hommes que tu as peut-être croisés au village et dont le nom ne te sera pas inconnu : Foucaud, Glemet et Pailloud qui lui est blessé grièvement. C'est difficile de voir tous ces jeunes visages défigurés par la guerre, tu sais. Je ne sais pas ce que l'on vous dit ou non chez nous, alors je préfère te dire les choses comme elles sont. Pailloud, en particulier, m'inquiète. C'est un bon soldat, mais malheureusement, il est très blessé, je ne pense pas qu'il s'en sortira. Il est brave, intelligent, avec un grand cœur, je crois qu'on aurait pu être amis. Quel gâchis...
Je serai rentré très vite, ne t’inquiète pas. 
A très vite.
​Je t'embrasse avec tendresse.
René
 30 Janvier 1915
Mon cher frère,
​Merci pour ces informations, elles m'aident à me sentir proche de toi et de tous ceux qui souffrent à tes côtés. Cela me fait réfléchir aussi. J’espère que ce soldat, tu sais, Pailloud, s'en sortira. Je prie pour lui. Tu n'​as pas besoin de me rassurer, ne t’inquiète pas, je sais me montrer forte pour vous. Je suis d'ailleurs certaine que tu t'en sortiras. Dis au soldat Pailloud que je l'encourage à prendre soin de lui. Il est toujours bon d'avoir du réconfort dans de pareils moments. De mon côté, je rassure père et mère comme je peux mais cela n'est pas facile.      
Prends soin de toi.
Je t'aime.
Adrienne
20 Avril 1915 
Ma chère Adrienne,
​Nous avons eu quelques soucis, je n'ai donc pu t'écrire aussi souvent que je l'aurais souhaité, mais ne t'inquiète pas, je vais bien. Plusieurs de nos soldats sont morts et cela devient difficile. ​Ces temps-ci, je ne pourrai pas vraiment t'écrire, cette lettre sera certainement une des dernières avant mon retour, ma sœur chérie. Je rentre très vite ne t’inquiète pas.
Je te fais la promesse de rentrer vivant.
​A bientôt.
​René
15 Mai 1915
​René,
​Prends soin de toi comme je le ferai, peu importe si les lettres ne me parviennent plus, l'essentiel, c'est que tu ne prennes pas de risques démesurés . Je pense très fort à toi, je prie tous les soirs pour que tu reviennes sain et sauf. Tu ne me parles plus de tes camarades blessés...J'espère que certains ont survécu. Envoie-leur des prières pour moi et donne-moi de vos nouvelles.
​Je t'embrasse mon très cher frère.
​Adrienne
​20 Juin 1915
​Mon Adrienne,
Je te sais inquiète pour moi et les nouvelles ne sont pas rassurantes... Foucaud est encore vivant, mais souffre d'une maladie assez grave, Glemet quant à lui a réussi à s'en sortir et Paillou... lui... est malheureusement mort hier. Ses blessures étaient trop graves, elles se sont infectées, nous n'avons rien pu faire.
​Je crois deviner que cette bien triste nouvelle pourrait t'affecter plus qu'une autre. ​Pourquoi ne m'as-tu rien dit plus tôt ? Il m'a été facile de deviner les sentiments qui t'unissaient à lui : Paillou n'a cessé de me parler d'une jeune fille qu'il avait rencontrée peu de temps avent de partir au combat. Cela ne suffira pas à t'apaiser, mais sache que ses sentiments étaient véritables.
Prends bien soin de toi, ma petite soeur, je prierai pour que ta douleur s'estompe.​Bien à toi.
      René